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Nouvelles recommandations 2024 de l'ESC pour le traitement d'une pression artérielle élevée et de l'hypertension
  • Jimmy Jacobs

Quatre nouvelles recommandations de l'ESC ont été présentées lors du Congrès européen de Cardiologie à Londres fin août 2024. C'est la nouvelle recommandation portant sur la 'prise en charge d'une pression artérielle élevée et de l'hypertension' qui a suscité le plus d'attention dans les médias populaires. Presque tous les médias, de VRT news à Het Nieuwsblad, en passant par les médias spécialisés dans l'actualité médicale tels que gezondheid.be et De Specialist, ont fait état des nouveautés contenues dans ces recommandations. Lors de ce congrès, on a également présenté les nouvelles recommandations de l'ESC sur la fibrillation auriculaire, les syndromes coronariens chroniques, les maladies vasculaires périphériques et les maladies aortiques.

Lorsqu'une nouvelle recommandation est publiée, il convient avant tout de s'intéresser aux changements apportés par rapport à 'l'ancienne' version. Dans quelle mesure les preuves scientifiques récentes ont-elles réussi à convaincre le comité de réécrire et d'adapter - si nécessaire - les 'anciennes' recommandations ?

Nous présentons ci-dessous un résumé des principaux changements relevés dans ce document de 107 pages.

Définition de l'hypertension

La nouvelle définition de la 'pression artérielle élevée' dans les recommandations 2024 de l'ESC constitue un aspect important de la mise à jour. En outre, le terme 'artériel' a été supprimé du titre, car une pression artérielle élevée peut également survenir au niveau des artères pulmonaires. Les recommandations reconnaissent désormais explicitement que le risque de maladies cardiovasculaires (MCV) augmente continuellement avec la pression artérielle, au lieu d'adopter une classification 'binaire' : normotendus vs hypertendus. Cela signifie que le risque augmente déjà à des valeurs de pression artérielle qui n'atteignent pas encore les seuils traditionnels utilisés pour parler d'hypertension. La nouvelle catégorie de 'pression artérielle élevée' (pression artérielle systolique 120-139 mmHg ou pression artérielle diastolique 70-89 mmHg) reconnaît cette relation continue. Elle repose sur des preuves croissantes indiquant que les antihypertenseurs peuvent également s'avérer bénéfiques pour les personnes courant un risque accru de MCV, même si leur pression artérielle ne s'inscrit pas encore dans la catégorie de l'hypertension. En introduisant cette catégorie, les recommandations visent à atteindre un plus large éventail de patients qui pourraient tirer des bénéfices de mesures préventives ou de médicaments, en tenant compte de la courbe continue 'risque de MCV/pression artérielle'. La suppression du terme 'artériel' rend également la recommandation plus largement applicable.

Objectifs tensionnels

La recommandation révisée introduit une nouvelle catégorie de pression artérielle, la 'pression artérielle élevée', définie comme une pression artérielle systolique de 120-139 mmHg ou une pression artérielle diastolique de 70-89 mmHg, mesurée au cabinet du médecin.

La nouvelle recommandation préconise une valeur cible de 120-129 mmHg de PA systolique pour les adultes prenant des antihypertenseurs, à condition que le traitement soit bien toléré. Cependant, les recommandations reconnaissent également qu'il est possible que cet objectif ne soit pas approprié et réalisable pour tous les patients, en particulier les sujets âgés fragiles (≥ 85 ans) et les patients souffrant d'hypotension orthostatique symptomatique. Dans ces cas, des objectifs moins stricts peuvent être envisagés. Le principe ALARA (as low as reasonably achievable), utilisé notamment en radioprotection, fait son apparition ici. Les recommandations soulignent également la nécessité de stratégies thérapeutiques personnalisées basées sur les caractéristiques du patient et sa tolérance aux médicaments. Étant donné qu'il existe une relation continue entre la pression artérielle et le risque de MCV, on propose une approche basée sur le risque. Chez les patients présentant une pression artérielle élevée, les recommandations préconisent de commencer par instaurer des mesures hygiéno-diététiques pendant trois mois, avant de passer à un traitement médicamenteux. Le traitement doit être individualisé en fonction du risque de MCV à 10 ans, en tenant compte des facteurs de risque traditionnels et non traditionnels.

Mesures en dehors du cabinet

L'accent mis sur les mesures effectuées en dehors du cabinet est à nouveau significativement renforcé, et ces mesures sont plus fortement recommandées, tant à des fins diagnostiques (constatation d'une hypertension) que pour le monitoring continu du traitement. Ce changement s'explique par le fait qu'on comprend de mieux en mieux la corrélation plus forte entre les valeurs tensionnelles mesurées en dehors du cabinet et les issues des MCV, par rapport aux seules mesures effectuées en consultation. Deuxièmement, les recommandations mettent en lumière la signification de la mesure de la pression artérielle à plusieurs moments et pendant plusieurs jours, en particulier en dehors du cadre clinique. Les recommandations soulignent qu'une seule mesure en consultation ne suffit pas pour poser un diagnostic fiable et que des mesures répétées, de préférence en dehors du cabinet, sont nécessaires pour exclure une hypertension de la blouse blanche et une hypertension masquée.

Les guidelines fournissent des recommandations spécifiques pour l'interprétation et l'utilisation des mesures de la pression artérielle à domicile et en ambulatoire, y compris des seuils spécifiques pour le diagnostic d'une pression artérielle élevée et d'une hypertension (figure 1).

Stratification du risque

Si les patients se retrouvent dans cette nouvelle catégorie de 'pression artérielle élevée' (PAS 120-139 mmHg ou PAD 70-89 mmHg), on propose d'évaluer le risque de MCV à 10 ans à l'aide des outils SCORE2/SCORE2-OP (figure 2) en tenant compte de l'âge et d'autres facteurs de risque, notamment les modificateurs non traditionnels du risque de MCV tels que l'anamnèse familiale, l'appartenance ethnique et les facteurs spécifiques au sexe. Chez les personnes courant un risque de MCV à 10 ans ≥ 10 %, on commence par des mesures hygiéno-diététiques. Si, après trois mois, l'effet est insuffisant, on peut alors instaurer un traitement médicamenteux si la pression artérielle est > 130/80 mmHg. Cette nuance est importante, étant donné que les nouvelles recommandations introduisent donc une catégorie de 'pression artérielle élevée' à partir de > 120/70 mmHg, et que le traitement pharmacologique n'est envisagé qu'en cas de risque élevé, d'effet insuffisant des mesures hygiéno-diététiques et si la pression artérielle reste > 130/80 mmHg. Pour la catégorie courant un risque de MCV à 10 ans de 5-10 %, on recourt aux modificateurs du risque additionnels (p. ex. un antécédent d'hypertension gravidique) et à des examens diagnostiques complémentaires (p. ex. le score CAC) pour affiner l'évaluation du risque. En fin de compte, les décisions thérapeutiques en cas de pression artérielle élevée doivent tenir compte du risque, de la tolérance du traitement et de la prise de décision partagée avec le patient, des objectifs moins stricts étant envisagés dans des situations spécifiques, telles qu'un âge très avancé ou une fragilité significative. En cas d'hypertension confirmée (≥ 140/90 mmHg), il est recommandé d'instaurer un traitement, quel que soit le risque de MCV calculé.

Interventions pharmacologiques

Les principales classes de médicaments ayant montré des preuves solides d'une diminution du risque de MCV lié à la pression artérielle restent les inhibiteurs de l'ECA, les sartans, les antagonistes calciques (dihydropyridines), les thiazides et les bêtabloquants. Les quatre premiers sont des options de première ligne. Les bêtabloquants peuvent être ajoutés dans des indications spécifiques (e. a. en cas d'insuffisance cardiaque ou après un infarctus). Dans ces cas, les bêtabloquants cardiosélectifs et vasodilatateurs de deuxième génération emportent la préférence. En outre, on insiste sur l'importance de combiner des médicaments et d'utiliser des associations fixes (single-pills) pour améliorer la compliance thérapeutique et minimiser les effets indésirables. On a encore besoin de données scientifiques complémentaires avant que les nouveaux médicaments tels que les inhibiteurs du SGLT2, les ARNI et les analogues du GLP-1 puissent faire partie intégrante de la prise en charge de l'hypertension. Bien que de plus amples études soient nécessaires pour confirmer le rôle de la dénervation rénale, nous voyons que cette technique (qui obtenait encore une recommandation de classe III en 2018) reçoit désormais une recommandation de classe IIB (B). Pour abaisser la pression artérielle, et si elle est pratiquée dans un centre ayant un volume d'activité moyen à élevé, la dénervation rénale par cathéter peut être envisagée chez des patients souffrant d'hypertension résistante dont la pression artérielle n'est pas contrôlée malgré une association de trois antihypertenseurs (incluant un thiazide), et qui choisissent de subir une dénervation rénale après une analyse conjointe des risques et une évaluation pluridisciplinaire.

Soins centrés sur le patient et groupes de patients spécifiques

On insiste davantage sur les soins centrés sur le patient, y compris la prise de décision partagée, qui doit favoriser l'implication du patient dans le traitement et sa compliance thérapeutique. Par ailleurs, on propose des recommandations plus spécifiques pour les jeunes adultes, les femmes enceintes, les sujets âgés, les personnes souffrant d'insuffisance rénale, de diabète, d'insuffisance cardiaque et d'autres affections spécifiques.

Conclusion

Ces recommandations révisées mettent l'accent sur une approche plus personnalisée et centrée sur le patient pour le contrôle d'une pression artérielle élevée et de l'hypertension, en insistant davantage sur les mesures effectuées en dehors du cabinet, sur une stratification adaptée du risque et sur des valeurs tensionnelles cibles globalement plus basses, si elles sont bien tolérées par le patient. Ces guidelines offrent des recommandations plus détaillées pour des groupes de patients spécifiques et intègrent les données probantes les plus récentes concernant la dénervation rénale et les nouveaux traitements pharmacologiques. Notre tâche consiste maintenant à veiller à ce que ces recommandations soient appliquées en pratique quotidienne, dans le cadre de campagnes de prévention, qu'elles soient clairement communiquées aux dispensateurs de soins primaires et inscrites dans les recommandations locales et nationales.

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