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Quid quand les ondes P et les complexes QRS ne coopèrent plus ?
  • Frederic Van Heuverswyn 

Un homme de 34 ans est traité par vérapamil dans le cadre de céphalées en grappe difficiles à contrôler. Étant donné la récente augmentation de la dose de vérapamil à 3 x 240 mg/jour, le patient a été adressé en vue d'un électrocardiogramme (ECG). Il ne présente aucun antécédent cardiaque, aucune plainte cardiaque et n'a pas d'intolérance à l'effort.

Quel est le diagnostic ?

  • Bloc auriculo-ventriculaire du deuxième degré de type Mobitz I (Wencke bach) ;
  • Bloc auriculo-ventriculaire du deuxième degré de type Mobitz II ;
  • Bloc auriculo-ventriculaire du troisième degré (bloc AV complet) ;
  • Dissociation auriculo-ventriculaire isorythmique ;
  • ECG normal.

Discussion de l'ECG

Au début de l'enregistrement, l'ECG montre une bradycardie sinusale à 43 bpm avec un intervalle PR normal, des complexes QRS normaux et une repolarisation normale. On observe un raccourcissement progressif de l'intervalle PR, suite auquel les ondes P finissent par disparaître dans le complexe QRS, puis dans le segment ST et enfin dans l'onde T.

Ce phénomène porte le nom de dissociation auriculo-ventriculaire isorythmique. Suite au fait que le rythme sinusal ralentit progressivement et/ou que le rythme jonctionnel/ventriculaire s'accélère progressivement, le rythme jonctionnel prend progressivement le dessus, créant ainsi une compétition entre les deux rythmes.

La dissociation auriculo-ventriculaire (AV) signifie que les oreillettes et les ventricules se contractent de manière indépendante. Il convient de distinguer trois formes de dissociation AV :

  • Davantage d'activité auriculaire que ventriculaire (P > QRS) : présence d'un bloc auriculo-ventriculaire (du deuxième ou troisième degré) avec indication possible d'implantation d'un pacemaker ;
  • Davantage d'activité ventriculaire qu'auriculaire (QRS > P) : rythme jonctionnel accéléré, rythme idioventriculaire accéléré, tachycardie jonctionnelle, tachycardie ventriculaire ;
  • Les activités auriculaire et ventriculaire sont similaires (P ≈ QRS). Lorsque l'activité ventriculaire devient légèrement plus rapide que l'activité auriculaire, les deux rythmes entrent en compétition, ce qui crée une dissociation AV isorythmique. Il y a autant d'ondes P que de complexes QRS, bien que les ondes P puissent être cachées dans le complexe QRS, le segment ST ou l'onde T.

La dissociation AV isorythmique est un phénomène provoqué par un tonus vagal élevé ou des médicaments qui ralentissent la conduction, et qui ne nécessite aucun traitement. Le vérapamil (antagoniste calcique) appartient aux antiarythmiques de classe IV et il a un effet dépresseur sur le noeud sinusal et le noeud AV. Une simple épreuve d'effort permet de montrer que la conduction AV est intacte, suite à l'accélération du rythme auriculaire. Une identification correcte est donc essentielle pour éviter des traitements ou des interventions inutiles. Ce patient était asymptomatique sur le plan cardiaque et a pu poursuivre son traitement par vérapamil à dose élevée pour des céphalées en grappe.

Référence

  1. Andries, E., Stroobandt R., De Pooter J., Verdonck F., Sinnaeve, F. ed. ECG uit of in het hoofd. Antwerpen: Garant uitgevers; 2016, p. 307-310.

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