Nous avons ces temps-ci, peut-être plus que d'habitude, un besoin de liberté, d'évasion, de vacances, de pouvoir souffler, … La pandémie liée au COVID-19 laissera certainement une trace dans les livres d'histoire, tout comme les épidémies de peste au moyen-âge ou de la grippe espagnole après la première guerre mondiale, avec non seulement les dommages directs liés à ce virus mais aussi avec ceux liés à sa prise en charge plus ou moins adéquate. Il y aura des leçons à tirer de cette pandémie, mais il faudra prendre un recul suffisant pour juger. Facile de critiquer les « experts » mais ils ont dû apprendre sur le tas car aucun n'avait de connaissances et une expérience sur ce virus en particulier. Facile de critiquer les politiciens qui surfaient sur la vague d'une information prolixe où tout et son contraire ont été dit, ce qui se poursuit d'ailleurs. Facile de critiquer les citoyens qui respectent plus ou moins bien les recommandations souvent pas toujours très précises, voire parfois farfelues comme la « bulle de 1 à la sauce belge » et plutôt à géométrie variable suivant le point du globe où on se situe. Même en Belgique, la loi pouvait changer suivant la région voir la commune. Nous n'étions certainement pas prêts et le virus a fait ressortir les manquements dans le système préexistant, médical y compris. Le virus a agi ainsi comme un agent pathogène, mais également comme un révélateur de nos faiblesses.
On nous demande de suivre fidèlement les recommandations de nos experts, de nos politiciens et je ne peux m'empêcher de faire le rapprochement avec notre pratique médicale dans la prise en charge d'une maladie chronique. Finalement, on demande aussi à nos patients de prendre leur médication et d'adapter leur mode de vie non pas pour quelques jours mais pour quelques années, sans leur donner beaucoup d'échappatoires !
La compliance au traitement est un réel problème pour les patients, mais il faut d'abord se remettre en question soi-même. Le médecin idéal doit connaître bien évidemment la démarche diagnostique et thérapeutique. Pour ce faire, il a heureusement reçu une formation et doit se remettre ses connaissances à jour régulièrement. Il est aidé par les sacro-saints guidelines basés si possible sur les études multicentriques randomisées ou à défaut définis par des experts supposés infaillibles. Que de critiques possibles déjà à ce niveau. En outre, le médecin est trop fréquemment individualiste et trouve souvent que le patient qu'il a devant lui ne correspond pas à celui décrit dans les études cliniques.
Le patient doit ou devrait prendre ses médicaments et adapter son hygiène de vie en fonction de nos recommandations … un peu comme nous devons obéir aux règles du comité national de concertation ou autre organisme. Le patient actuel, tout comme le citoyen belge, n'est plus du style à accepter tout et à avaler tous ses médicaments sans discuter. Le patient veut savoir et comprendre la pathologie dont il est atteint et il en va de même pour les médicaments qu'il doit prendre. De plus, il demande de la transparence et veut devenir acteur de sa propre santé. C'est toute l'importance de l'éducation à la santé. Bien comprendre sa pathologie permet aux patients d'améliorer sa compliance à nos prescriptions.
Cette discussion est d'autant plus importante quand le patient ne ressent pas un bénéfice direct à sa médication, voir présente des effets secondaires. Facile de convaincre un patient qui a une douleur articulaire de prendre un analgésique mais beaucoup plus difficile pour un patient asymptomatique de prendre son hypolipémiant, son hypotenseur ou son traitement diabétique, dans un but de prévention secondaire et pire encore en prévention primaire. La vaccination est un autre exemple caricatural : pourquoi risquer des effets secondaires pour une maladie qu'on n'aura peut-être jamais alors qu'il suffit que les autres se vaccinent pour vous ou que le virus disparaisse par un coup de baguette magique.
On peut trouver des systèmes pour améliorer la compliance comme la prise unique de sa médication plutôt que deux ou trois fois par jour, combiner plusieurs principes actifs dans une seule pilule ou encore utiliser un pilulier mais quoi qu'il en soit, l'éducation des patients avec un message clair et uniforme est probablement la meilleure façon de motiver le patient et d'améliorer son adhérence au traitement. C'est certainement un des intérêts majeurs des prises en charge pluridisciplinaires dans les pathologies chroniques … et peut-être ce qui a manqué un peu ou beaucoup dans la prise en charge du COVID-19. Tout cela nécessite une structure efficace de notre système de santé, touchant tous les acteurs de santé, et donc un certain investissement, humain et financier.
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