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Inhibiteurs PCSK9: position en pratique clinique
  • Olivier Gurné

Les inhibiteurs de la PCSK9 ont fait une apparition remarquée dans l'approche du traitement hypolipémiant depuis quelques années, avec des résultats impressionnants en termes de réduction des taux de LDL cholestérol, utilisés seuls ou associés à des statines. Le but du symposium organisé par Sanofi - Regeneron lors du récent meeting de la Société Européenne de Cardiologie à Rome était de revoir leur place potentielle dans notre pratique clinique et cela également à la lueur des nouveaux guidelines.

Encore marginalement utilisés en Belgique (non remboursés jusqu'il y a peu), cette nouvelle classe médicamenteuse est encore peu connue. Les statines largement utilisées depuis longtemps agissent en inhibant au niveau hépatique l'HMG-CoA reductase et par là, la synthèse du cholestérol. Les statines ont largement fait leurs preuves dans de multiples études randomisées et en prévention secondaire, chez des patients à haut risque, le dogme tiré de plusieurs méta-analyses est d'obtenir le taux le plus bas pour réduire le risque cardiovasculaire (lower is better). Ces nouvelles molécules agissent différemment: ce sont des anticorps monoclonaux qui inhibent la PCSK9, la proprotéine convertase subtilisine/ hexine de type 9, dont le rôle est de se fixer au niveau des récepteurs du LDL - cholestérol et d'induire leur dégradation par les lysosomes (figure 1). En inhibant cette molécule, on diminue la dégradation de ces récepteurs essentiellement au niveau hépatique et on augmente donc leur concentration, ce qui permet de réduire les taux de LDL de façon considérable, additive à celle des statines qui augmentent l'expression de la PCSK9, ce qui limite leur efficacité.

La problématique des patients avec un taux de LDL restant élevé est importante en pratique quotidienne. Les nouveaux guidelines de 2016, présentés également à Rome durant ce meeting, recommandent chez les patients à très haut risque cardiovasculaire (maladie cardiovasculaire documentée, patient diabétique avec atteinte d'un organe cible, insuffisance rénale sévère, risque SCORE calculé ≥ 10 % à 10 ans) un taux de LDL cholestérol inférieur à 70 mg/dL ou une réduction d'au moins 50 % du taux basal de LDL cholestérol s'il est entre 70 et 135 mg/dL. Pour ceux 'simplement' à haut risque (risque SCORE entre 5 et 10 %, diabète non compliqué, insuffisance rénale modérée), la limite est ramenée à 100 mg/dL (recommandations de classe I, niveau d'évidence B). Pour y arriver, on peut essayer d'améliorer le régime et l'adhérence au traitement, d'ajouter de l'ézétimibe ou un fibrate mais également envisager l'introduction d'un inhibiteur de la PCSK9.

Le problème de l'intolérance aux statines et des problèmes musculaires a fait l'objet de nombreuses controverses et survient chez 10 à 25 % des patients, ce qui est loin d'être simple quand on sait que ce sont des molécules diminuant la mortalité de façon très significative par exemple en prévention secondaire. Dans l'étude GAUSS, 511 patients avec une histoire d'intolérance aux statines due à des problèmes musculaires, comme par exemple des myalgies, ont été suivis. Après une phase A (placebo vs atorvastatine), les patients qui avaient des plaintes 'intolérables' musculaires sous statines et pas sous placebo, ont été randomisés entre evolocumab (injection sous-cutanée mensuelle) et ézétimibe. Après un follow-up de 24 semaines, l'inhibiteur de la PCSK9 entrainait une réduction du LDL cholestérol de 53 %, supérieure à ce qu'on obtenait avec l'ézétimibe de 17 %. Sur le plan musculaire, 23,3 % des patients rapportaient des plaintes musculaires (myalgie, douleur ou faiblesse) sous ézétimibe (6,8 % d'arrêt du traitement pour raisons musculaires) contre 17,2 % sous evolocumab (7,6 % d'arrêt) dans cette population très sélectionnée. Dans ODYSSEY 'ALTERNATIVE' toujours chez des patients intolérants aux statines, on a observé moins de plaintes musculaires dans le groupe alirocumab par rapport au groupe atorvastatine (32,5 % vs 46 %) alors que dans le groupe ézétimibe, 41 % étaient trouvés assez proche finalement du groupe statine.

Dans ODYSSEY 'LONG TERM', 1 553 patients à risque cardiovasculaire élevé et recevant déjà une statine à la dose maximale supportée ont été traité par alirocumab (une injection sous-cutanée / 2 semaines) et comparé à 788 patients avec un placebo: une réduction de 61 % du LDL cholestérol se traduisait par une réduction de 48 % de la survenue d'événements cardiovasculaires, même si on peut estimer que l'étude n'était pas assez puissante pour le démontrer (pas assez d'évènements et donc analyse post-hoc, le critère principal d'investigation étant la réduction du cholestérol). Des chiffres comparables (réduction de 53 % à un an) ont été trouvés dans les études OSLER 1 et 2 avec l'evolocumab (2 976 patients comparés à 1 489 sous placebo, en plus du traitement standard: 70 % étaient sous statines, 13 % sous ézétimibe) qui entrainait une réduction du LDL cholestérol de 61 %, ce qui est fort encourageant même si la critique de cette étude est la même: pas assez d'évènements survenus durant le follow-up de un an pour une étude dont le end-point principal n'était pas clinique mais 'lipidique'.

La réduction escomptée est donc une réduction du risque cardiovasculaire de l'ordre de 50 %, comme le montre la figure 2 tirée du travail de D. Waters (Circulation Research 2015). Ce sont assez logiquement les patients avec un taux de départ très élevé qui diminuent le plus leur taux de LDL cholestérol. Quant à la question de savoir si des taux 'très bas' ne seraient pas délétères, il semble que les patients chez qui on obtenait des taux inférieurs à 25 mg/dL n'avaient pas plus de complications que les patients avec des taux supérieurs. Le principe de diminuer au plus le LDL cholestérol même s'il peut paraitre 'agressif' semble donc attractif toujours si on veut réduire au plus le risque cardiovasculaire.

De nombreuses données continuent à s'accumuler avec cette nouvelle classe thérapeutique mais la principale remarque à l'heure actuelle est de prouver par une étude basée non plus sur une réduction du LDL cholestérol mais par une étude surtout visant des end-points principaux cliniques (réduction d'évènements cardiovasculaires voir mortalité), l'utilité de ces médicaments apparemment fort séduisants sur le plan physiopathologique. La question de l'aspect coût / bénéfice clinique devra être envisagée car le côté financier prend de plus en plus d'importance en médecine, ce n'est un secret pour personne et toutes les molécules innovantes arrivant sur le marché sont confrontées avec ce dilemme.

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