Compte rendu du congrès de l'ESC
L'hypertension reste un facteur de risque majeur dans le monde, grevé d'une morbidité et d'une mortalité importante malgré les progrès technologiques réalisés dans la mesure de la pression artérielle et la disponibilité de médications efficace. Faire le point 4 années après la publication des derniers guidelines (ESC / ESH) était le but de ce symposium organisé dans le cadre du meeting de la Société Européenne de Cardiologie.
Introduction
Josep Redon - Valencia, Espagne
Comme rappelé par Josep Redon, la mortalité cardiovasculaire attribuable à l'hypertension a augmenté d'environ 20 % entre 1990 et 2015, tant chez l'homme que chez la femme (même si l'hypertension est plus fréquente et grevée d'une mortalité plus importante chez l'homme que chez la femme. Le vieillissement de notre population mais aussi l'obésité croissante (y compris chez les plus jeunes) expliquent au moins en partie cette évolution. Beaucoup trop de patients ne sont pas pris en charge de façon optimale dans le monde et ce phénomène est encore plus marqué dans les pays moins développés, lié à la compliance des patients, l'inertie des médecins et de la carence en général de la structure et de l'organisation du système de santé dans la prise en charge des maladies chronique.
Hypertension, the silent pandemic that still runs the major clinical and economic burden
Francesco Cappuccio - Coventry, Royaume-Uni
Francesco Cappuccio a montré que la prévalence de l'hypertension est importante, variable suivant les régions : plus fréquente en Afrique (37 %) et plus rare en Asie (25 %). Au niveau européen, on considère une prévalence de 29 % dans la population. L'hypertension artérielle est un facteur de risque cardiovasculaire majeur. Le risque d'accident vasculaire cérébral augmente tant avec la pression systolique que la pression diastolique. La réduction de la pression artérielle diminue le risque cardiovasculaire à tout âge.
Même si certains facteurs ne sont pas modifiables (âge, race, sexe, génétique), on peut prévenir l'hypertension en améliorant l'hygiène de vie (réduire le sel, lutte contre l'obésité, encourager l'exercice physique, diminuer la consommation d'alcool, …). La détection de l'hypertension artérielle est cruciale. Non seulement la moitié des patients ne sont pas diagnostiqué, 12 % des patients hypertendus ne sont pas traités et 20-25 % de ceux traités le sont insuffisamment. Environ 20 % des patients seulement sont sous contrôle alors que l'évidence est là : chaque réduction de 10 mmHg réduit le risque cardiovasculaire de 20 %. L'inertie thérapeutique reste donc un problème mais il en va de même pour améliorer l'adhérence au traitement (de 50 à 80 % des patients ne prennent pas tous les médicaments prescrits).
Les guidelines datant de 2018 et sont pourtant très clairs comme l'illustre la figure 1. La première étape recommande dès le départ une association avec un inhibiteur de l'enzyme de conversion ou de l'angiotensine avec un antagoniste calcique ou un diurétique. La seconde étape va vers une triple association entre ces molécules. La troisième étape en cas d'hypertension résistante est d'associer de la spironolactone ou une autre drogue. Les bêtabloquants peuvent être considérés à tout moment, surtout s'il existe une indication spécifique à leur utilisation (maladie coronarienne, insuffisance cardiaque, fibrillation auriculaire, …). La combinaison de médicaments (et encore plus si une seule « pilule » est utilisée) augmente nettement l'adhérence à long terme.
Walk through that sliding door now: how to modify the trajectory in hypertension management
Michel Burnier - Lausanne, Suisse
Michel Burnier a clairement montré que dans les études cliniques récentes, un contrôle adéquat de la pression artérielle peut être obtenu chez la majorité des patients (60-80%) recevant une combinaison d'au moins deux médications, situation bien différente de la pratique quotidienne. L'étude TRINITY par exemple obtient un bon contrôle tensionnel évalué par une mesure ambulatoire de la pression artérielle (TA < 130/80 mmHg) avec une triple association olmésartan 40 mg / amlodipine 10 mg / hydrochloro thiazide 25 mg, nettement supérieur à une bithérapie de ces molécules. Il faut donc se donner les moyens si on veut arriver à un bon résultat. L'étude BP-CRUSH, grâce à une approche progressive arrive à ce résultat chez 90,3 % des patients sous trithérapie. Les chiffres étaient même meilleurs chez les non-obèses (92,5 %) par rapport aux obèses (88,1 %) ce qui permet de rappeler qu'améliorer l'hygiène de vie parallèlement au seul traitement médicamenteux est certainement utile.
Au niveau de méta-analyses, l'adhérence des patients à leur traitement varie en fonction de la classe thérapeutique, pouvant aller de seulement 28,4 % avec les bêtabloquants à 65,6 % avec les inhibiteurs de l'angiotensine. Les antagonistes calcique (52 %) et les diurétiques (51 %) sont entre les deux. La prise d'une seule pilule combinant les différentes médications améliore l'adhérence et permet ainsi la persistance d'un contrôle adéquat de la pression artérielle. Il faut donc aller contre les freins à ce type d'approche qui sont par exemple le manque de connaissance des guidelines et d'expérience des médecins à ce type de traitement par une pilule unique, combinant plusieurs médications.
Références
- Williams, B., Mancia, G., Spiering, W., Rosei, E.A., Azizi, M., Burnier, M. et al. 2018 ESC / ESH Guidelines for the management of arterial hypertension. Eur Heart J, 2018, 39 (33), 3021-3104.
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