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Faut-il plutôt améliorer les interventions coronaires, ou bien la prévention?
  • Christiaan Vrints

Récemment, l'étude DOCTORS (Does Optical Coherence Tomography Optimize Results of Stenting) a été présentée lors du Congrès Européen de Cardiologie organisé à Rome, et a été rapidement publiée dans le périodique Circulation.1 L'étude DOCTORS est la première étude randomisée visant à évaluer l'utilité de la tomographie par cohérence optique (OCT) lors d'une intervention coronaire percutanée (PCI). Comparativement à l'échographie intravasculaire (IVUS) classique, l'OCT donne des images à haute résolution plus détaillées de l'intima.

L'idée des investigateurs était que l'évaluation par OCT, tant avant que pendant la PCI, peut conduire à un recouvrement plus précis de la plaque athéroscléreuse et à une amélioration de l'expansion et de l'apposition du stent coronaire. On a évalué si ceci produisait également un meilleur résultat fonctionnel, mesuré au moyen de la FFR (réserve coronaire fractionnelle). Le résultat de l'étude s'est révélé extrêmement positif: dans le groupe de patients chez qui la PCI était pratiquée sous contrôle par OCT, la FFR était significativement plus élevée que chez les patients chez qui le stent avait été mis en place sous contrôle angiographique. La différence au niveau du résultat fonctionnel final après la PCI était toutefois très réduite, et n'atteignait que 2 points de pourcentage: 0,94 ± 0,04 versus 0,92 ± 0,05, p < 0,005. Les investigateurs ont toutefois démontré que l'allongement de la durée de l'intervention et le volume plus élevé de produit de contraste inhérent à l'utilisation de l'OCT n'entraînaient pas de conséquences cliniques négatives immédiates, mais ils n'ont pas communiqué d'informations au sujet du résultat clinique à plus court - ou plus long - terme.

Bien que, dans un commentaire annexé,2 l'étude DOCTORS ait déjà été qualifiée d'étude décisive en termes d'obtention de preuves suffisantes en faveur de l'utilisation de l'OCT durant des PCI complexes, on peut malgré tout se demander s'il est cliniquement pertinent de vouloir encore perfectionner un résultat fonctionnel final - déjà très bon - après une PCI réalisée sous contrôle angiographique, grâce à l'utilisation d'une technique d'imagerie intracoronaire extrêmement onéreuse (une sonde d'OCT coûte plus de 1000 €). N'est-il pas illusoire de penser qu'un perfectionnement encore plus poussé d'une PCI, déjà très performante, chez un patient souffrant d'un syndrome coronarien aigu, peut améliorer le pronostic à plus long terme?

Les résultats de l'étude clinique NORSTENT, également publiée récemment,3 répondent partiellement à cette question, et tempèrent quelque peu l'enthousiasme … Lors de cette étude, on a étudié les effets à long terme d'une PCI, soit avec un stent nu (BMS), soit avec un stent médicamenteux (DES). Dans cette étude, lors de laquelle 9 000 patients randomisés vers une PCI avec un BMS ou unDES ont été suivis pendant une médiane de cinq ans environ, on n'a pas noté de différence sur le plan du critère d'évaluation combiné de décès et d'infarctus myocardique aigu spontané. L'utilisation d'un BMS était toutefois associée à une augmentation de la fréquence d'interventions de revascularisation à 6 ans. Si la différence par rapport à une PCI avec un DES était statistiquement très significative, elle était néanmoins relativement faible: 19,8 % versus 16,5 %. Il se peut que les stents actuels soient à ce point perfectionnés que la différence en termes de réinterventions cliniquement nécessaires en raison d'une resténose après une PCI avec BMS, par rapport à une PCI avec DES, soit fortement réduite. Ceci n'enlève rien aux bénéfices cliniques d'une PCI avec DES, mais peut-être devrions-nous nous demander si un perfectionnement supplémentaire des DES pourrait être encore vraiment associé à un bénéfice clinique plus important.

Sur le plan du traitement de l'infarctus myocardique aigu sans susdécalage du segment ST (NSTEMI), la cardiologie interventionnelle moderne a surtout été marquée par une importante amélioration du pronostic intrahospitalier et du pronostic à court terme. En dépit des puissants traitements antithrombotiques et du perfectionnement poussé des stents coronaires, le pronostic à plus long terme des patients NSTEMI reste grevé d'une morbi-mortalité élevée.4 Les résultats de l'étude NORSTENT confirment que le pronostic à long terme d'un patient souffrant d'une maladie coronarienne n'est pas déterminé par le résultat clinique d'une intervention sur une sténose coronaire focale, mais bien par la progression de la maladie coronarienne et la survenue - ou non - d'une rupture ou d'une érosion au niveau de plaques coronaires 'vulnérables', localisées ailleurs.

Comparativement au traitement de l'infarctus myocardique aigu à l'époque du président Eisenhower, la cardiologie a connu d'énormes progrès au cours des 50 dernières années.5 La coronaropathie ischémique précoce et compliquée d'Eisenhower a surtout été déterminée par son mode de vie: c'était un fumeur invétéré, qui 'grillait' plus de deux paquets par jour. En ces temps difficiles de restrictions budgétaires, qui impliqueront (encore?) des économies dans le secteur de la cardiologie, et compte tenu de l'énorme vieillissement de la population, qui ne fait que s'amorcer, il ne faut rien attendre de procédures coronaires sans cesse plus onéreuses et plus perfectionnées mais, plus que jamais, s'atteler à la prévention primaire des maladies coronariennes.

Références

  1. Meneveau, N., Souteyrand, G., Motreff, P., Caussin, C., Amabile, N., Ohlmann, P. et al. Optical Coherence Tomography to Optimize Results of Percutaneous Coronary Intervention in Patients with Non-ST-Elevation Acute Coronary Syndrome. Circulation, 2016, 134 (13), 906-917.
  2. Wijns, W., Pyxaras, S.A. Optical Coherence Tomography Guidance for Percutaneous Intervention: The French “Doctors” Are Seeing Light at the End of the Tunnel. Circulation, 2016, 134 (13), 918-922.
  3. Bønaa, K.H., Mannsverk, J., Wiseth, R., Aaberge, L., Myreng, Y., Nygård, O. et al. Drug-Eluting or Bare-Metal Stents for Coronary Artery Disease. NEngl JMed, 2016, 375 (13), 1242-1252.
  4. Fox, K.A.A., Carruthers, K.F., Dunbar, D.R., Graham, C., Manning, J.R., De Raedt, H. et al. Underestimated and under-recognized: the late consequences of acute coronary syndrome (GRACE UK-Belgian Study). Eur Heart J, 2010, 31 (22), 2755-2764.
  5. Messerli, F.H.,Messerli, A.W., Lüscher, T.F. Eisenhower's Billion-Dollar Heart Attack—50 Years Later. NEngl JMed, 2005, 353 (12), 1205-1207.

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